Dimanche 8 août – Le grand départ
Le grand voyage commence... Nous voilà à l'aéroport direction Barcelone pour retrouver notre bateau. Une heure d'avion, une demi heure de train, un quart d'heure de taxi et nous arrivons enfin au port avec nos 30 kilos de bagages ! Nous retrouvons nos marques, admirons le bateau et nous préparons psychologiquement à la levée du bateau prévue le lendemain matin à la première heure...
La préparation psychologique est d'autant plus facile que Nadège et une amie nous rejoignent à bord pour un petit apéro !! Nadège arrive le pied en sang... en alpagant notre taxi, elle trébuche sur des bouts de verre éparpillés par terre.. Nous nous racontons nos dernières anecdotes, dinons au repère des marins du port olympique et retournons au bateau pour notre première nuit à bord en tant que matelots à durée indeterminée !
Lundi 9 août – Changement de planning
Nous nous levons tant bien que mal, épuisés par la semaine de déménagement entre Lyon, Grenoble et Paris, nous allons à la capitainerie pour confirmer la levée du bateau, le boss Sébas nous voit arriver et notre fatigue doit se lire sur nos visages car il nous demande si ce n'est pas mieux d'attendre le lendemain !! Ce que nous acceptons avec grand plaisir ; nous voilà donc partis pour une journée courses pour nous et le bateau. La mission : trouver une ferreteria ouverte en plein mois d'août en Espagne... c'est reparti pour une demi heure de bus, une demi heure de marche et ça y'est elle est là ! Nous achetons ce dont nous avons besoin pour attaquer notre chantier et encore nous n'avons pas tout...
Mardi 10 au Samedi 21 août – Carénage
Nous avons rendez-vous à la première heure pour la levée du bateau, la première heure qui s'avère être en Espagne 10h30 ! Bref nous y sommes, grand moment d'émotion, nous voyons le bateau se faire soulever par une grue pouvant porter 45 tonnes, rien que ça ! Et peu à peu la coque du bateau apparaît, un peu sale certes, toute une vie collée à notre coque, entre les coquillages, algues et vers...
Nous voilà face à 10 jours de travail intense mais nous ne le savons pas encore ! Nous attaquons plus motivés que jamais avec machettes et grattoirs pour enlever les coquillages tenaces, un coup de carsher pour les finitions et là le vrai boulot commence. Nous sommes équipés de combinaisons blanches et masques de fuite pour alertes chimiques, de vrais petits astronautes ! Nous passons donc les quatre jours les plus physiques de notre vie, ponçage, reponçage et rereponçage sous 30 degrés, les bras en l'air et le dos tordu... On peut dire que nous sommes vraiment des pros maintenant !
Nous avons découvert la mauvaise nouvelle sous forme de petites bulles remplies d'acide qui envahissent notre coque toute poncée ; le verdict est tombé nous sommes osmosés, heureusement ce n'est pas dramatique l'osmose reste externe. Nous parlons aux peintres des chantiers voisins, chacun y va de son idée, personne n'a vraiment de solution miracle mais nous recevons tout un tas de conseils différents des uns des autres ! Nous nous en remettons donc à notre peintre de confiance Lucho, un colombien ancien éleveur de langoustines, peintre à Barcelone depuis une vingtaine d'années !
Nous consacrons donc deux journées à trouver les bulles, les percer avec une disqueuse, les asperger d'eau douce, les laisser sécher, les réasperger, les relaisser sécher et ainsi de suite... nous remplissons les points d'osmose d'un mélange de mastic et d'epoxy ; c'est la solution à court terme la plus efficace afin d'éviter de laisser notre bateau sécher pendant 6 mois. Nous serons tranquilles pendant 3 ou 4 ans.
POINT OSMOSE :
L'osmose est le cancer du bateau en fibre. C'est une réaction chimique provoquée lors de la rencontre eau de mer et fibre polyesther du bateau. Si cette rencontre a lieu c'est parce que l'étanchéité du bateau n'est plus tout à fait efficace ! L'humidité s'installe donc dans la coque et s'auto-alimente. L'osmose est critique quand elle s'attaque à la partie interne de la coque. Ouf ce n'est pas notre cas !
Cette histoire d'osmose nous a un peu déprimé car nous voyons notre chantier ralentir et nous avons peur de ne pas pouvoir profiter du bateau avant cet hiver... Tous les peintres de la zone technique nous réconfortent et nos voisins de ponton passent régulièrement nous voir pour nous encourager.
Nous allons prendre un café au bistrot des matelots pour nous faire une petite pause ; ici il pleut depuis deux jours... Barcelone est triste et nous aussi. Nous rencontrons alors une famille française sur la route de retour de vacances ; nous parlons bateaux, chantiers, osmose ! Sympathique famille et Franck le capitaine nous invite le soir pour un apéro dans son splendide dehler 39 ; de quoi nous faire sentir en famille dans une bien agréable maison !
Gilbert, voisin de ponton et ami, vient gentiment nous apporter du thon fraichement péché aux Baléares, Seb est ravi de pouvoir manger des protéines et moi je trouve ça bon finalement!
Le lendemain visite surprise de Pauline, Damien et Sébastien ; ils ont réussi à nous trouver alors que nous étions méconnaissables entre les combinaisons blanches et les masques... Nous déjeunons ensemble à notre repère, après-midi viste pour eux et ponçage pour nous ! Soirée mojito riche en rigolades et la venue non attendue de Laurent et Rachel, en roadtrip en Espagne après leur périple néo-zélandais... Un petit dodo de 3 h pour nous, c'est qu'on a du boulot quand même !
Nous sommes ravis, au moment le plus critique, nous avons reçu tout un tas d'émotions qui nous a permis de repartir de plus belle...
Nous reprenons donc du poil de la bête en s'attaquant au cinq couches de peinture à venir ! Beaucoup moins épuisant que le ponçage et beaucoup plus motivant, nous voyons chaque jour notre bateau avec une couleur différente ! Nous avons donc commencé par deux couches d'interprotect (permet d'assurer l'étanchéité de la coque), suivies d'une couche de primocon (permet une bonne tenue de l'antifouling), et nous avons terminé par deux couches d'antifouling ; plus aucun coquillage ne viendra faire sa vie avec nous !
Pour ceux qui veulent s'attaquer à ce chantier, vous pouvez consulter la page carénage sur laquelle nous vous détaillons les étapes...
Pendant le séchage des différentes couches de peinture, nous en avons profité pour redonner un bon bleu à notre ligne de flottaison et à notre ligne de mi-coque (a-t-elle un nom cette ligne d'ailleurs ?!). Nous avons poli la coque avec une super machine à poils et du lustrant si bien qu'on se voyait dedans ! Nous avons du coup fabriqué artisanalement des chaussettes de parbattages ; hors de question de salir notre nouvelle coque !
David, un chef peintre a fait le vide dans son local du varadero à la façon espagnole, 3 jours de tri qui d'ailleurs s'est avéré très efficace car il a fini par avoir la fleme et tout jetter ! Nous avons récupéré tout un tas de choses dont du papier collant doré ! Nous avons designé nos lettres pour rebaptisé le bateau, d'ailleurs quelle galère pour enlever son ancien nom ! Regratter, reponcer, un petit coup d'acétone qui s'avère être un produit miracle à bord !
Le nouveau nom de notre bateau symbolisait la fin d'un dur chantier, dix jours intenses de 9h à 20h30.
Samedi matin 21 août, jour de la remise à l'eau ; Sébas le chef du veradero vient soulever le bateau avec sa grue géante..
Vous croyez que c'est terminé mais non !! Restent à faire la même chose sur les cinq pilliers qui maintiennent le bateau hors de l'eau mais cette fois ci en cinq heures c'était bouclé !
La grue nous emmène donc dans l'eau, le bateau est tenu par quatre sangles ; nous sommes inquiets et émus à la fois ; nous ne reverrons pas la coque hors de l'eau avant l'année prochaine...
Nous sortons tout de suite en mer pour appréhender la réaction du bateau, une sensation géniale ; on sent le bateau glisser dans l'eau...