Jeudi 16 août – Traversée vers Khania
7 h, c’est maintenant ou dans quelques jours donc on largue les amarres. On part par un vent force 5 au près, puis au travers. On fonce à près de 7 nœuds pendant 6 heures. Le vent s’essoufle à force 3 / 4, mais on avance encore à presque 5 nœuds. Soudain retentit une grosse explosion, on scrute le large, rien ne nous apparaît. Un peu plus tard, de la musique berbère égaye le canal 16. Il y a-t-il une relation de cause à effet ??
On continue notre traversée dans la bonne humeur avec nos diverses activités : réglages de voiles, mots fléchés, scrutage de la mer, bronzage… On n’arrête pas !!
La Crète se dessine peu à peu, elle est plus grande et montagneuse que ce qu’on s’imaginait. Deux heures avant l’arrivée, le vent tombe, la nuit est tombée aussi. Très concentrés nous lisons le livre de navigation : « Khania, le port est tranquille à l’abri de l’agitation de la ville ». Quelle ne fut pas notre fou rire et notre stupéfaction à l’entrée de la passe quand nous apercevons la foule et le ram-dam d’un concert agité.
Il y a un port d’accueil en face des discothèques bruyantes, ça ne nous dit absolument pas. On s’avance dans le petit port des locaux. Il n’y a que deux petits pontons et une petite place restante ! Bon, il y a une plaque en or avec le nom du bateau gravé, ca semble privé ! Il est presque minuit, la ville est agitée, nous nous lançons à la conquête de Khania. Nous sommes salés et franchement dégueus après nos 16 heures de nav sous le soleil clinquant. Quel choc en découvrant la population super branchée et bien habillée. On ne doit vraiment pas être ragoutants car on n’intéresse même pas les rabatteurs de resto et bars ! Bref, on se lavera demain.
Vendredi 17 août au dimanche 19 août – Khania
Une nuit bien reposante nous fait du bien. Nous découvrons Khania de jour et profitons d’être à quai pour nous relancer dans de petites réparations. Le meltem va gronder pendant quelques jours et va certainement nous bloquer ici par la même occasion. Quitteà être dans une ville qui bouge, on décide d’aller faire la fiesta. Un bar rock avec une DJ aux airs sataniques nous fait danser jusqu’à 5h du mat’. On retrouve dans le bar El Mundo des « amis » hardrockers de Lydia. N’en disons pas plus… On se marre bien mais le lendemain est plutôt difficile. On dort, on mange, on dort, on va à la plage, on dort. Bref, on a fait une fiesta à Khania.
Dimanche c’est le départ pour Henri et Lydia après 15 jours et plus de 250 milles. Dans les Cyclades, c’est l’éclate à la voile ! On est émus mais on remet ça l’année prochaine !
Allez pour nous c’est gros ménage en attendant l’arrivée de Lulu et Gaby.
Dimanche 19 août au mardi 21 août – Khania avec Lulu et Gaby
Les voilà sac à dos et sourire aux lèvres. Nous accueillons nos matelots pour quelques jours. Le meltem souffle tellement que les promènes-personnes et les pêcheurs ne sortent pas et se sont même amarrés au fin fond du port. C’est mauvais signe pour les jours à venir. La météo n’est pas bonne, on restera dans le coin. On ne se démonte pas, on trouve un autre moyen de locomotion.
A bord de nos scooters, le vent nous rafraîchit et on roule vers un monastère. On laisse nos scooters et un chemin sinueux nous emmène à au autre monastère abandonné. Il y a des ruines, un olivier dans les ruines et une chèvre sur les ruines qui tend le bout du nez pour attraper quelques feuilles de l’olivier. On se demande comment elle a bien pu arriver là ; Une seule solution, elle a sauté un bon mètre à une quinzaine de mètres de hauteur. Vaillante !
Nous on continue pendant une petite demi-heure dans le lie d’une rivière asséchée. On aperçoit la mer furieuse qui envoie des rouleaux agressifs sur les roches. On ne se baignera pas là ! Le chemin continue et nous aussi. Les déferlantes ont créé un jacuzzi naturel parmi les douces roches. Ni une ni deux, on s’approprie les lieux et on savoure le spectacle de la mer déchaînée. Nous sommes seuls et heureux dans notre baignoire naturelle.
La remontée est corsée surtout avec le soleil qui tape. On rentre fatigués.
Le lendemain, on se fait une sortie à la voile. Les conditions ne sont franchement pas agréables mais Gaby à l’aise barre. Lulu, l’estomac fébrile, s’affole un peu des vagues. La fin de meltem nous a amené 2 bons mètres de houle, ça remue ! L’approche du port n’est pas évidente, les vagues déferlent contre la jetée d’un côté et de l’autre, sur le brise-lame. On rentre à la voile, ça nous stabilise.
Un apéro en guise d’ »à bientôt », on se reverra à Lyon car les vacances s’achèvent pour Lulu et Gaby.
Mercredi 22 août – Khania, Camille et Sébastien apprentis matelots
De bon matin nous bricolons, il fait franchement trop chaud.
Une fois le hublot réparé et en attendant notre nouvel équipage, nous allons visiter le musée de la marine. Nous revivons l’histoire de la Crète avec des maquettes et les plans d’attaque. C’est très instructif, on apprend notamment que les arabes ont récupéré la Crète alors que les byzantins éméchés, étaient entrain de fêter leur victoire ! Ca nous fait bien rire !
Toc toc toc ! Nos homonymes arrivent, 2 Camille et 2 Sébastien à bord, va falloir changer les prénoms !
Visite du bateau, explications diverses et variées, c’est parti pour une semaine !
Jeudi 23 août – Rhetimon
De bonne heure et de bonne humeur, certes un peu envasés de la soirée de la veille, nous larguons les amarres par un petit force 3 et 32 milles à parcourir. On commence au moteur ; berk. Le vent monte un peu, nous avançons grand largue pendant 6 heures. Nous arrivons, le port d’accueil n’est pas vénitien comme prévu et l e marinero nous accoste sur un quai avec vue sur débarcadère du ferry. L’endroit n’est pas très glamour, les big buildings non plus ! Il fait vraiment très chaud, heureusement la plage n’est pas très loin, on va se rafraichir avant d’aller découvrir la ville vénitienne qui dénombre petites ruelles au charme certain. On trouve aussi le fameux port vénitien, entouré des nombreuses tavernes, comme d’habitude ! On rencontre les propriétaires de Dam Marine, une famille qui navigue depuis 5 ans en Méditerranée, ils nous donnent leurs bons plans d’hivernage. Cette journée nous a crevé, on ne s’endort pas tard.
Vendredi 24 et samedi 25 août – Porto Bali
Vers 9h, il fait déjà une chaleur de plomb, Seb donne un cours de navigation à nos matelots Camille et Sébastien, très concentrés sur la carte avec le compas et la règle de Cras !
Nous partons en fin de matinée vers porto Bali, une petite crique à 17 milles d’ici. Il n’y pas vraiment d’air contrairement au force 3 / 4 annoncé par la météo. A force d’optimisme, le vent se lève, nous avançons au grand largue jusqu’à notre destination. Nous découvrons un tout petit port de pêcheurs, disons plutôt une petite digue avec une petite dizaine de bateaux de pêche. Malgré l’hôtel qui surplombe la petite baie et les parasols sur la petite plage, l’endroit est préservé et vraiment agréable. L’eau est propre et transparente, on saute du bateau à la recherche de la tortue aperçue à l’entrée de la passe. Elle s’est carapatée, nous remontons à bord déçus après une petite heure de nage.
Quelque temps plus tard, les pêcheurs nous alpaguent « Tortle here ! ». Ni une ni deux, un gâteau encore dans la bouche, nous sautons à l’eau. On la voit, elle est majestueuse, elle nage vite et finit par nous semer. On la retrouve, dégustant les écailles de crevettes qu’un pêcheur est entrain d’éplucher. On la regarde de près, on lui caresse la carapace. Elle remonte de temps en temps juste à côté de nous pour respirer. Elle s’empiffre des restes de crevettes. Le pêcheur nous dit qu’elle vient tous les jours se faire un petit gueuleton.
Lui, c’est Mustapha, il est égyptien et a 28 ans. Il est ici depuis pas mal d’années. Il nous invite à bord « My boat is your boat ». On va lui chercher un petit apéro et on fait connaissance. La soirée avance, on retrouve aussi Asteri, un grec qui nous a aidé à nous amarrer. Nous voilà tous ensemble sur notre bateau, on refait le monde en prenant l’apéro.
On va à la taverna, il y a des danseuses grecques ! On passe une bonne soirée, on rentre vers 2h du mat’. Camille et Seb sont en forme, ils restent jusqu’à 5h avec Asteri et Mustapha.
Mustapha part travailler, il n’a pas dormi. Il rentre vers 10h du mat’ le lendemain matin. Il est crevé et nous apporte un sac rempli de poissons que les 2 Seb s’empressent de vider. On ne sait
plus comment le remercier. La journée du samedi passe vite entre baignade, sieste et promenade. Ce soir c’est grillade de poissons. Mustapha nous rejoint mais il ne mange pas car il ne fait qu’un
repas par jour, le midi.
Dimanche 26 août – Nisos Dhia
Ah ça va mieux, nous sommes reposés ! Un dernier petit thé avec Mustapha pour lui dire à bientôt et bonne chance. Nous larguons les amarres en fin de matinée pour rejoindre l’île de Dhia, en face d’Héraklion. La mer est belle, nous avançons avec un force 4. On en profite d’ailleurs car dans 2 jours, un gros coup de meltem est prévu. Dhia est une petite île inhabitée à 6 milles d’Heraklion. Plus on s’approche, plus les rafales sont fortes. Il y a plusieurs bateaux qui sont venus passer la journée ici, on sera sans doute seuls cette nuit. On s’enfonce dans la baie en arc de cercle, le vent tombe. On va explorer à terre, on se dit que l’endroit est idéal pour faire un feu de bois, surtout qu’il nous reste une dizaine de poissons à manger. On s’approche de la petite « grotte-chapelle » ; nous sommes éberlués, tout est là. Il y a une petite table avec des chaises, il y a des grilles de barbecue, et même du charbon. C’est décidé, on passera la soirée ici. On lance un feu de bois pour avoir des braises et on rentre au bateau, impatients de revenir avec nos victuailles.
Une douche rapide à l’eau de mer et on charge l’annexe. On s’installe avant la tombée de la nuit, les pommes de terre sont dans les braises. On admire le paysage, on est heureux. Un peu plus tard un visiteur dont nous avait parlé Mustapha s’invite. Il s’approche, nous regarde, il n’a pas peur. C’est un gros rat avec le pelage tout hirsute ! On le chasse car c’est un coup à ce qu’il nous ramène tous ces copains ! Je dois bien admettre que ce visiteur surprise nous affole un peu ! Tous munis d’un bâton au cas où, nous décidons de plier bagages une fois les poissons grillés. On déménage notre festin au bateau et on s’offre un petit bain de minuit !
Lundi 27 août – Spinalonga
9h, le soleil cogne comme chaque matin, l’eau est encore plus transparente qu’hier. Une baignade et un petit dej et nous levons l’ancre. Les rafales sont à force 6, nous partons au portant à 7 nœuds. Un peu plus tard, le vent tombe à force 3 / 4 avec des rafales irrégulières tant au niveau de la direction que de la puissance. On prend un ris, on le lâche, on se règle pour le grand largue, puis pour le travrs, un peu de bon plein, puis on repasse travers, puis grand largue… Le vent retombe, puis il revient au cap avec un force 6. La grande baie d’Aghios Nikholaos avec ses hautes montagnes accélère le vent. On se prend 35 nœuds par rafales, le bateau fonce. On arrive vite dans la baie de Spinalonga, que c’est beau ! Une petite île fortifiée au milieu d’une grande lagune. On peut mouiller partout entre 3 et 10 mètres de fond de sable.
On fait un petit tour de baie, il n’y afranchement pas grand monde. On mouille près de l’île de Spinalonga finalement. Il y a du vent, on s’offre une petite baignade, le soleil commence déjà à se coucher. Cette nuit, un force 6 / 7 est prévu, on se dit qu’il est plus raisonnable de passer la nuit au port d’Aghios Nikholaos. On repart donc pour 10 milles avec un force 5 / 6. La mer est juste ridée, il n’y a pas de houle. Le bateau fait un joli bruit, il a l’air heureux. On arrive de nuit, impossible de resquiller, il y a des marineros qui guettent l’entrée. Il nous dirige vers une place, nous tend les pendilles. Grand luxe, ca fait longtemps qu’on ne nous a pas accueilli comme ça ! Il nous montre la capitainerie, les douches (la classe !). Il nous indique même un bon resto hors-circuit touristique, on se gave !
Mardi 28 août au dimanche 2 septembre– Aghio Nikholaos
Nous voilà donc en fin de voyage pour cette année. Les tarifs de la marina sont raisonnables, environ 7 euros par jours pour nous. C’est la dernière journée pour notre équipage. Quant à nous, nous allons profiter des quelques jours restants pour préparer le bateau à son hivernage et profiter de la fin des vacances. Au final, on s’occupe surtout du bateau. En grande innovation, on remarquera les chomards à l’avant et le bimini d’occase, une véritable aubaine ! On a fait une offre pour acheter un optimiste à l’école de voile mais ça ne les intéresse pas, dommage. En tout cas le bateau a assuré, presque rien n’a cassé, et il nous a fait des records de vitesse.
Le départ approche, il est temps de dire au revoir au bateau. Je suis seule sur le pont. La presque pleine lune illumine le ciel. J’écoute les bruits du port que je ne retrouverai que dans longtemps : les drisses frappent, les pare battages grincent, le vent siffle doucement entre les haubans. La nuit est paisible, les bateaux se balancent tranquillement et semblent se reposer.
